Nos prisons

Publié par memoires-polaroides sur 13 Janvier 2021, 10:33am

Quelle merveille que ce morceau de musique de Ryuichi Sakamoto ! Je ne peux m'empêcher de pleurer en l'écoutant. Pleurer de joie, comme si ma tristesse et ma douleur étaient enfin reconnues, comprises, transcrites fidèlement par un piano et quelques instruments à cordes oscillant entre deux notes pour chaque accord. Il y a aussi ces passages grinçants, comme un retour à la réalité de mon esprit tourmenté aux humeurs incontrôlables. Une réussite.

Cette journée ressemblera à celles de ces derniers mois, sans la possibilité de m'installer à une table de café pour assister au spectacle des gens et raconter ce j'imagine de leur vie, en y mettant de la mienne, bien sûr.

Se mettre à la place de l'autre est chose impossible, par définition, mais nous sommes capables de considérer sa souffrance, de l'entendre et de la soulager en partie avec des mots, des caresses. L'empathie et l'affection qui en découlent sont d'une puissance incroyable pour guérir des plaies qui semblaient ouvertes à jamais. Je ne sais pas si les miennes se refermeront un jour. J'ai besoin d'aide pour cela. Nous avons tous besoin d'aide.

Il a beaucoup neigé hier sur mon pays. Aujourd'hui, la température est remontée et il pleut légèrement. Je n'aurai pas le plaisir de marcher dans la poudreuse comme il y a des années. Il faut se contenter d'un peu de blanc, un jour ou deux.

Mon corps me fait mal parfois. Au niveau des articulations. Un peu d'arthrose probablement. L'isolement plus ou moins important que nous subissons depuis bientôt une année n'est pas sans conséquences sur la santé.

Je pense à toutes les personnes enfermées en prison. La privation de la liberté est une punition terrible qu'il ne faudrait envisager qu'en dernier recours, lorsqu'aucune autre solution n'est possible. La plupart des gens sont incarcérés inutilement et ressortent déglingués. Cette pandémie et les restrictions qu'elle induit devrait nous éclairer un peu sur ce que subissent les prisonniers. La façon dont nous traitons les gens qui s'écartent du « droit chemin » en dit long sur notre système. La France, soi-disant pays des droits de l'homme, n'a aucune leçon a donner au reste du monde, notamment à cause des conditions de détention honteuses qu'elle inflige à ses détenus. On ne guérit pas les plaies d'une société en traitant des humains de la sorte mais on les creuse d'avantage, on rajoute du malheur au malheur.

Rien ne disparaît.

Tout acte a des conséquences.