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Le blog de memoires-polaroides

Le blog de memoires-polaroides

Ce blog raconte en majeure partie la vie de son auteur. Au fil de ses articles, ce dernier livre ses états d'âme et dépeint le monde qui l'entoure à sa façon.


Pendant qu'ils dorment

Publié par memoires-polaroides sur 15 Février 2021, 07:59am

Pendant qu'ils dorment

Tel un serpent, le temps ondule et avance, inexorablement. Il nous dépossèdera de tout, de la vie, enfin. Avant le grand saut, je lui abandonnerai quelques lambeaux, dans la douleur.

Ma mère vieillit difficilement physiquement. Elle vit ce naufrage dont parlait le général. La souffrance la rend parfois morose mais, la plupart du temps, elle ne se plaint guère, ne voulant pas, je pense, rajouter ses malheurs à mes angoisses. Nous devrions commencer par être vieux et rajeunir tout au long de notre existence, passer notre vie à guérir mais au lieu de ça, nous sommes contraints d'assister au triste spectacle de la dégradation du corps et de l'esprit.

La nuit est encore là, protectrice, enveloppant mon quartier d'une noirceur à peine perturbée par les réverbères jalonnant les rues désertes et glaciales de ma presque ville. J'aime l'aube, ce calme, cet abandon du monde, cet aveu de faiblesse de la part des hommes contraints de dormir, souvent assommés de fatigue par une vie qu'ils n'ont pas voulue. C'est dans ces moments de fragilité que je me surprends à les aimer. Je les imagine abandonnés à leurs songes, sur une autre scène, jouant une pièce plus sincère, dans une salle vide, débarrassés du public et de ses exigences terribles. J'entends presque leur respiration lente, ce va-et-vient incessant, creusant dans leur profondeur pour atteindre ce qu'ils fuient dans le monde solide de peur d'être marqués au fer rouge et exclus. Ils n'ont plus dans leurs rêves cette nécessité de bomber le torse ou de courber l'échine.

Ils sont. Nus. Beaux.

La météo n'exclut pas quelques percées du soleil aujourd'hui. Je le voudrais ailleurs que sur ces cubes de béton qui m'entourent. Les rares arbres épargnés bordant ma cité semblent, avec leurs branches sans feuille qui filent vers le ciel, rajouter à la tristesse de cet interminable hiver. Rien n'est beau par ici, mis à part les Alpes, au loin, changeantes en fonction de la lumière et des nuages qui s'accrochent à leurs cimes.

Il est 7 heures 30. Les premiers bruits de la ville se font entendre. Dehors, il gèle.

J'ai conscience qu'il ne faut pas que j'attende des jours meilleurs pour vivre, ressentir cette pulsion qui me pousse à respirer, que je le veuille ou non. Chaque instant devrait être une célébration. Mon corps ne me trahit encore pas alors je me dois d'être là et reconnaissant de cette présence.

Car, admettons-le humblement, c'est bien tout ce que nous sommes.

Une présence.

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