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Le blog de memoires-polaroides

Le blog de memoires-polaroides

Ce blog raconte en majeure partie la vie de son auteur. Au fil de ses articles, ce dernier livre ses états d'âme et dépeint le monde qui l'entoure à sa façon.


Francesca

Publié par memoires-polaroides sur 21 Novembre 2023, 07:52am

Francesca

Je termine mon repas dans un petit resto italien d’habitués, un boui-boui où l’on mange bien, où les coudes se lèvent souvent, comme les mains réclamant une tournée supplémentaire. J’aime cet endroit. Les gens viennent s’échouer ici et parler de ces riens qui remplissent une vie, avant le tombeau. Parce que ce sont essentiellement des vieux qui réchauffent le skaï des banquettes de cet établissement, des retraités trompant leur solitude. On se parle facilement. Pas de chichis inutiles. Tous sur un pied d’égalité. Les douleurs, les maladies, les enfants absents… On se rince la tristesse au blanc local, on essaye d’oublier sa condition en lisant le journal pendant que le café refroidit dans la tasse. Esthétiquement, ce resto est dépourvu de charme avec ses tables, ses chaises et ses banquettes d’une déprimante sobriété. La vue est sans intérêt. D’un côté, le chantier de la nouvelle place avec le creusement d’un immense parking souterrain et de l’autre le hall très passant de la galerie marchande avec sa grande porte à tambour, l’entrée principale. Pourtant, c’est coincé au milieu de cette laideur admise que j’en me sens bien, à cause de la chaleur dégagée par ces gens n’ayant plus rien à prouver, hors jeu, bruts, francs, simples. Et puis il y a le serveur et la serveuse, affables, aux petits soins avec la clientèle.

Ce centre commercial de Meyrin, en Suisse voisine, à deux pas de chez moi, est un lieu de rencontre, de vie. Un lieu social en définitive. Rien à voir avec ceux que l’on trouve en France côté pays de Gex, glacials. Meyrin compte plus de 26 000 habitants et plus de 100 nationalités. Un mélange bénéfique. Pas de ghetto, pas d’affrontement mais des passerelles contre la peur de l’autre, essentielles. Il m’arrive, après avoir passé la journée là où ailleurs à Genève, de ne plus vouloir revenir dans ma Gaule natale où les antagonismes sont forts, l’agressivité étant perceptible jusque dans l’épaisseur de l’air. Une pression qui parfois mène à l’éclatement et à la violence, le dialogue n’ayant plus lieu.

J'avale la dernière cuillère de mon mascarpone et commande un café. Une femme corpulente prend place à côté de moi, sur la banquette. Elle soliloque. Peu importe ce qu'elle dit. Au ton de sa voix, je devine le plaisir qu'elle ressent d'être enfin là, en famille. Pour elle se sera le plat du jour mais avec fusilli et non macaroni. Des exigences d'habitués, des petites manies qui font les bons clients, ceux que l'on choie, dont la table est un peu réservée...

Il y avait un resto turc à deux pas : « La Rose pourpre ». On y mangeait plutôt bien et là encore, c'était un endroit où des habitués aimaient à se rencontrer. Il y a quelques mois, à la place, une chaîne de fast food renommée s'y est installée avec des écrans pour commander de la merde dans un décor déprimant aussi chaleureux que des pissotières d'autoroute.

 

À chaque fois que je passe devant, j'ai des pulsions à la José Bové...

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