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Le blog de memoires-polaroides

Le blog de memoires-polaroides

Ce blog raconte en majeure partie la vie de son auteur. Au fil de ses articles, ce dernier livre ses états d'âme et dépeint le monde qui l'entoure à sa façon.


Vieillesse

Publié par memoires-polaroides sur 17 Juin 2012, 18:58pm

Catégories : #C'est du sérieux...

 

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La chaleur m'enveloppe comme le ferait une serviette humide et chaude. La lumière est forte. Même l'ombre se fait éblouissante. Sur les tables de la terrasse du golf subsistent les reliefs du repas de ce dimanche midi. Quelques clients s'attardent. Il y a un couple de vieux qui n'en finit pas de râler sur la piètre qualité du service. La femme carbure au rosé et s'endort de temps en temps, quelques secondes, entre deux critiques. C'est peut-être son vide qu'elle remplit de vin. Lui, il semble se moquer de tout ça. Il proteste par solidarité. C'est un vieillard. Arrivé à un certain âge, les gens attendent la mort sans colère, sans agacement, avec la patience de ceux qui savent qu'ils auront bientôt satisfaction. Mon arrière grand-père a rendu l'âme à presque cent ans. Il aurait pu partir comme le Papet dans Manon des Sources, allongé sur le dos, habillé, coiffé, prêt à être mis en boîte. Il n'est pas mort en costume mais il était tout de même sur le départ, saturé de fatigue et de lassitude. Deux guerres et un siècle d'existence, ça vous vient à bout de n'importe quelle force de vie. Quelques corbeaux croassent en contrebas, vers le green. Ce sont des oiseaux dont ils se passeraient bien ici, qui tranchent avec le côté idyllique de l'endroit. Des points noirs sur un monochrome vert. Le couple de vieux s'en va. Monsieur marche difficilement alors madame, moins vieille, écarte les chaises sur son passage. Il reste du rosé dans leurs verres. Il ne devait pas être assez frais. Je regarde ma montre machinalement. Ça fait une éternité que je suis là, baignant dans un calme bourgeois, seulement perturbé par le balai des domestiques maladroits. Je n'attends rien si ce n'est que dure ce moment. Je n'ai à supporter que des drames de gens bien nantis : une part de tarte trop chaude, une table bancale ou une longueur entre un plat et un dessert. Je considère les petites révoltes qui en découlent comme un divertissement. Les corbeaux s'en sont allés. Sur la terrasse presque déserte, les conversations ronronnent doucement et accentuent le calme. Je vais rentrer, retourner dans le bruit. Avec l'âge, je supporte de moins en moins l'agitation des hommes. Ma vie n'est peut-être plus qu'une convalescence fragile, la quête d'un silence d'hôpital.

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